|
L'espace visuel est défini en partie par le champ panoramique
qui est l'étendue totale d'espace visible par l'animal,
si on considère ses deux yeux comme équivalents
à un il cyclopéen; il correspond au champ
de tous les points dont l'image se forme sur au moins une des
deux rétines et correspond à l'ensemble des deux
champs monoculaires
et du champ
binoculaire.
Le champ visuel du chat est un secteur très difficile à
explorer objectivement; le problème majeur
est d'interpréter la réponse de l'animal au cours
d'expériences similaires à celles réalisées
chez l'homme, en utilisant des dispositifs stimulant la rétine
centrale et surtout périphérique MUZET
(26). On trouve cependant plusieurs données
dans la littérature, qui sont complètement différentes,
si bien qu'il est difficile aujourd'hui de se faire une opinion.
Voici à l'heure actuelle les deux hypothèses possibles
:
Hypothèse 1 Hypothèse2
Dans la première hypothèse, le champ de vision binoculaire
est moins important chez le chat que chez l'homme mais les champs
de vision monoculaires sont semblables. Dans la seconde hypothèse,
le champ de vision binoculaire est lui semblable, mais les champs
monoculaires sont deux fois plus importants chez le chat.
Le champ panoramique dans le premier cas est quasi-similaire à
celui de l'homme, contrairement au second cas où là,
il est considérablement augmenté, avec une différence
de l'ordre de 280° contre 210° en moyenne.
Si on retient la deuxième hypothèse, cette différence
significative s'explique:
- par la position de l'orbite, et donc de l'il, légèrement
plus frontale chez le chat que chez l'homme.
- par la position du cristallin, disposé plus en arrière
de la grande chambre antérieure au sein de l'il félin.
- par les dimensions cornéennes: en effet, le rayon de
courbure de la cornée du chat est plus important; elle
s'étend sur un arc de cercle de 170°, s'ouvrant ainsi
sur l'extérieur par un angle d'étendue transparente
de 140°, alors que celle de l'homme a un rayon de courbure
moindre, s'étend sur un arc de 60°, et s'ouvre donc
sur l'extérieur par un angle de 95°.
Oeil humain en coupe sagittale
Oeil félin en coupe sagittale |
![]() |
C'est donc bien le
champ de vision monoculaire qui est plus conséquent chez
le chat et le champ de vision binoculaire est à peu près
équivalent.
La conséquence
de cette différence est que le chat possède une
vue plus large sur un monde sans relief, tel celui que perçoivent
les animaux chassés ; l'aire aveugle étant moins
étendue, cela lui permet de mieux contrôler son environnement,
et en particulier de détecter des stimuli (ou prédateurs)
et mouvements que l'homme ne peut pas voir, en périphérie
de son champ de vision, même si, on le verra, l'acuité
visuelle en région périphérique est médiocre.
Il a donc à la fois un regard de proie et un regard de
fauve (voir stéréoscopie).
Nous pouvons nous amuser à imaginer, à travers
des photographies, ce que perçoit le chat.
Plaçons nous maintenant dans l'univers d'un
chat : N'importe quel propriétaire aura remarqué
l'intérêt que porte le chat à sa gamelle de
nourriture, qu'elle soit remplie de croquettes ou de pâtée,
peu importe; si
l'on prend cet exemple, voyons maintenant quelle serait la différence
entre la perception de cette même gamelle par l'homme et
par le chat, dans la même position, c'est à dire
à hauteur de chat ; dans un premier temps, intéressons
nous au champ visuel.
Voici le champ visuel de l'homme:
et celui du chat:
Il s'agit de la perception en relief .
Le chat a une vision tridimensionnelle aussi perfectionnée que celle de l'homme. Ceci est lié à son importante vision binoculaire, du fait de la position frontale des deux yeux, mais aussi à l'importante décussation des fibres optiques au niveau du chiasma optique (de 65 à 75%); chez l'homme, la stéréoscopie est optimale avec 50% de fibres qui décussent; les 2 yeux peuvent donc analyser la même image sur les 2 rétines, une partie du champ visuel de chaque il chevauchant l'autre, et comparer les disparités horizontales, qui éloignent deux points de ce même objet, ou deux points de 2 objets différents.
Dans cette situation de décussation inexistante, la vision cérébrale de la flèche est illogique .
Alors que dans cette situation de décussation partielle des fibres, existante chez l'homme et le chat, on retrouve bien une analyse croisée correcte de la flèche qui rend sa vision cérébrale correcte et donc sa perception adéquate.
L'analyse cérébrale est effectuée dans
des aires spécifiques, aussi bien chez l'homme comme chez
le chat.
En conclusion, le chat sait donc apprécier l'espace,
localiser les différents objets (ou les proies) à
l'intérieur de celui-ci, déterminer leur distance
par rapport à lui-même, et en estimer leur profondeur.
Ses capacités, qualités essentielles de l'animal
chasseur, sont au moins équivalentes à celles de
l'homme.
L'il accommode lorsqu'il regarde un objet rapproché, afin de le rendre net. En effet, tous les points de l'infini convergent naturellement sur la rétine et en particulier la région centrale de l'il, l'area centralis, mais lorsque ces points se rapprochent de l'il, il devient nécessaire d'accommoder, c'est à dire dévier les rayons lumineux, pour qu'ils convergent sur la rétine.
La capacité d'accommodation est déterminée par deux notions, le ponctum proximum et le ponctum remuntum, entre lesquels l'accommodation est nécessaire pour voir net:
|
|
|
il du chat |
|
|
il Humain |
|
|
Le ponctum proximum du chat a été déterminé
comportementalement par Bloom et Berkley en 1977, qui ont cherché
le point d'inflexion des valeurs de l'acuité visuelle, en considérant
comme principe que les valeurs d'acuité visuelle obtenues
à des distances plus proches que le ponctum proximum étaient
plus basses que celles obtenues au ponctum proximum et au delà.
L'intervalle compris entre 25 et 36 cm résulte des marges
de l'expériences, la tête du chat pouvant bouger
légèrement. BLOOM et BERKLEY (7).
L'accommodation est réalisée par une mobilisation en convergence des deux yeux, un myosis qui augmente la profondeur du champ, mais surtout par une déformation et/ou un déplacement du cristallin.
Chez l'homme, la région antérieure et centrale de la capsule du cristallin est fine et particulièrement molle; elle peut donc facilement se déformer, diminuant ainsi le rayon de courbure de la face antérieure. Ce mécanisme assure ici la grande majorité de l'accommodation.
Chez le chat par contre, le cristallin est peu déformable car il est très rigide; c'est donc son avancée limitée qui permet une accommodation de 2 à 4 dioptries. Comparée à l'homme, cette amplitude d'accommodation est faible puisqu'un adulte peut accommoder de 10 dioptries.
Ce défaut d'accommodation est corrigé par un
pouvoir de réfraction
oculaire total
des dioptres
de l'il, cornée et cristallin, nettement supérieur
chez le chat, avec en moyenne 79.5 dioptries contre
58 dioptries en moyenne chez l'homme. De fait, l'il du chat
accommode pauvrement mais réfracte mieux que l'il
humain, ce qui laisse penser que le chat peut voir nettement de
30 cm à 20 mètres; en dessous de 25 (jusqu'à
36cm selon les individus), il perçoit son environnement
flou. Il faut donc qu'il prenne du recul pour faire sa mise au
point.
Revenons à notre gamelle, tant convoitée par le chat ; que voit-il en s'approchant, à 1 mètre, à 40 cm et quand il arrive plus près, à 15 cm ? Il est amusant de comparer avec les mêmes images, perçues par l'il humain :
Lorsqu'ils se rapprochent, l'homme et le chat voient respectivement à 1 mètre de distance:
A cette distance, la gamelle est floue pour le chat, alors que l'homme peut encore faire une mise au point pour la distiguer nettement.